Vous êtes sur le point d’écrire votre scène de combat et vous imaginez un moment épique dans votre roman. Mais voilà, difficile de retranscrire ce que vous avez en tête sur la page blanche de votre manuscrit. Les scènes de combat et d’action font d’ailleurs partie des scènes les plus difficiles à écrire dans une histoire. Voici dix conseils pour rendre votre scène épique et pour éviter de perdre vos lecteurs avec des échanges de coups interminables.

Quel est le rôle de votre scène de combat ou d’action ?

Le but de la scène de combat ou d’action

Ce n’est pas parce que vous ajoutez de l’action dans votre récit que vous faites avancer votre intrigue. Votre scène joue-t-elle bien un rôle dans votre récit ?

N’hésitez pas à réfléchir à la manière dont cette scène fait avancer votre intrigue pour voir si elle a bien sa place.

Quel est l’objectif de votre protagoniste dans cette scène ? Quelles sont ses motivations (le « pourquoi » qui explique leur but) ? Quel est l’enjeu si le protagoniste et ses alliés échouent (ce qu’ils risquent de perdre) ? La réponse n’est pas forcément « ils risquent tous de mourir ». Et quel va être l’impact de cette scène au niveau émotionnel ?

Exemple dans The Witcher

Dans la saison 1 de The Witcher (épisode 3), Geralt se bat contre une strige. Mais son objectif n’est pas de gagner en la tuant. Il essaie de l’empêcher de retourner dans sa tombe jusqu’au lever du jour pour rompre le maléfice. Non seulement c’est une adversaire très dangereuse, mais en plus, il essaie de se défendre et non de la tuer.

Idem avec Renfri à la fin de l’épisode 1, il se bat contre elle pour l’empêcher d’arriver à ses fins, mais il ne veut pas la tuer. On voit d’ailleurs deux étapes dans le combat : dans la première partie de l’affrontement, il ne fait que se défendre, puis dans un second temps, il se rend compte qu’il n’aura d’autre choix que de la tuer. Sa mort le hante par la suite.

La différence entre le roman et le film : éviter le coup par coup

Quand on commence à écrire des scènes de combat, on s’imagine souvent décrire toutes les actions, comme dans les chorégraphies spectaculaires qu’on peut voir dans les films. Or une scène de combat dans un roman est bien différente, car l’auteur ne peut pas s’appuyer sur le visuel.

Par conséquent, si vous voulez décrire chaque coup comme dans un film, vous allez vous retrouver avec une scène interminable. D’autre part, le lecteur doit faire un effort important pour se représenter tout ce qu’il se passe. Certains lecteurs n’aiment d’ailleurs pas les scènes de combat pour cette raison.

Vous pouvez donc montrer certains enchaînements de coups, mais pensez aussi à résumer pour éviter de rendre votre scène interminable et difficile à visualiser.

Les capacités des personnages

Le protagoniste et ses alliés

Votre protagoniste ne sera pas forcément capable de se battre à l’épée dans une scène de combat ou capable de sauter n’importe quel obstacle et de courir à toute vitesse dans une scène d’action. Il ne connaît peut-être même pas les différents types d’armes.

N’hésitez pas à réfléchir aux forces et aux faiblesses de vos personnages. Cela vous permettra d’imaginer de manière réaliste ce qu’il est susceptible de se passer. Si votre protagoniste n’a jamais tenu une épée de sa vie, il ne serait pas plausible de le voir gagner un duel à l’épée, du moins pas de manière « conventionnelle ».

Réfléchissez aussi à l’état et à la forme physique des personnages avant et pendant le combat. S’ils sont déjà blessés, ils partent avec un désavantage. Ils seront peut-être même incapables de se battre.

Leurs émotions peuvent aussi avoir un impact sur l’issue du combat. Un personnage en colère pourrait par exemple foncer tête baissée et commettre des erreurs.

L’antagoniste et la menace

Une scène de combat dans laquelle il est évident que votre protagoniste et ses alliés ont le dessus sera plate et manquera de tension. L’issue de la scène doit être incertaine. Montrez que l’antagoniste pourrait remporter le combat. Laissez vos personnages lutter pour s’en sortir.

Dans la série Daredevil, lorsque ce dernier affronte Nobu dans la saison 1, on pense qu’il ne va pas s’en sortir. Nobu est un adversaire beaucoup plus fort que lui. Ce combat le pousse dans ses retranchements.

Pensez aux réactions et aux sensations de votre personnage

Quand je critique des scènes de combat, il m’arrive de remarquer que le narrateur (quand il s’agit d’un personnage présent) n’a que très peu de réactions et de sensations alors qu’il est en train de se battre. Les actions s’enchaînent à toute vitesse, mais on ne sait pas ce qu’il ressent et ce qu’il pense.

Tout est une question de dosage, car en pleine action, votre personnage n’a pas le temps de réfléchir longuement à ce qu’il se passe. Mais il est important de partager au lecteur ce que le personnage ressent et ses réactions face à ce qu’il se produit. Un protagoniste qui prendrait des coups sans rien sentir ne serait pas très réaliste (sauf si c’est propre au personnage et que c’est donc voulu).

Utilisez des verbes forts et rythmez vos phrases

Au niveau des phrases, vous pouvez jouer avec le rythme afin de donner une impression d’action rapide. Des phrases plus courtes donnent un rythme plus saccadé et rapide.

Utilisez la voix active plutôt que passive, car la voix passive donne justement une impression de passivité et ralentit le rythme.

Les verbes que vous choisissez permettent également de rendre votre scène plus percutante. Pensez à utiliser des verbes d’action qui décrivent bien l’intensité du combat et sa violence.

Rythmez votre bataille pour la rendre épique

Si vous prévoyez une bataille très longue, n’hésitez pas à prévoir des pauses et des variations. Une tension très haute maintenue trop longtemps peut avoir l’effet inverse de celui souhaité, car cela deviendra fatigant pour le lecteur. Une longue bataille peut aussi devenir répétitive et ennuyeuse.

Exemple dans Harry Potter

Dans Harry Potter et les reliques de la mort, la Bataille de Poudlard s’étale sur plusieurs chapitres, avec des pauses et des moments chargés d’émotions entre chaque partie. Cette bataille se devait d’être longue et épique pour clôturer les sept tomes, mais pour autant, elle ne semble pas interminable et ennuyeuse. En effet, elle est marquée par plusieurs phases. Pendant une pause dans la bataille, Harry voit les souvenirs de Rogue. C’est un moment chargé en émotions. Puis il fait face à Voldemort et on pense que tout est terminé. Après ce moment tendu, bien qu’il ne s’agisse pas d’un combat à proprement parler, Harry parle à Dumbledore à King’s Cross. Puis la bataille reprend avec le face à face final entre Harry et Voldemort.

Exemple dans Les Deux tours

Dans le film Les Deux tours, la bataille du Gouffre de Helm se déroule en plusieurs temps. Les forces de Saroumane tentent de pénétrer dans la forteresse et la bataille fait rage, mais elle prend un nouveau tournant quand ils trouvent une faille dans la forteresse. Nos héros battent progressivement en retraite et tout semble perdu, jusqu’à ce que Gandalf arrive et change la donne. Il y a donc plusieurs temps dans la bataille.

Jouez avec l’environnement, les armes, le temps et le lieu

L’environnement va avoir un impact sur le combat et il peut d’ailleurs le rendre beaucoup plus intéressant.

Pensez à le décrire quand c’est plausible (pas en plein combat, lorsque votre personnage est concentré pour survivre). Les descriptions permettront au lecteur de ne pas se sentir perdu et vous évoquerez en même temps une ambiance.

À quoi ressemble le lieu dans lequel ils se battent ? Dans l’épisode 2 de la série Daredevil, ce dernier se bat dans un couloir étroit. Dans cette situation, ses ennemis ne peuvent pas tous l’assaillir en même temps. Leur liberté de mouvement est très limitée.

Dans Les Deux tours, la forteresse du Gouffre de Helm présente une faiblesse qui va permettre aux forces de Saroumane de pénétrer dans son enceinte.

Quels sont les objets disponibles pour se battre ? S’ils n’ont pas d’armes sur eux face à un ennemi armé, que peuvent-ils utiliser dans leur environnement ?

La météo peut elle aussi avoir une incidence, par exemple en rendant le sol glissant ou boueux. De même, un combat en pleine nuit pourra avantager ou désavantager vos personnages.

Insérez des dialogues de manière réaliste

On ne pense pas forcément aux dialogues quand on écrit une scène d’action et pourtant, je vois beaucoup d’erreurs avec ces dialogues !

Quand on est en plein effort, on est essoufflé et on ne peut donc pas se lancer dans un long monologue. Il est donc plus plausible d’écrire des phrases courtes qui permettent de simuler l’essoufflement du personnage.

D’autre part, il paraît difficile de tenir une longue conversation pendant qu’on est en train de courir à toute vitesse ou de se battre.

Les dialogues ne doivent évidemment pas disparaître de votre scène, mais vérifiez s’ils sont bien réalistes. Ils peuvent d’ailleurs venir alléger la tension. Les films Marvel en sont un bon exemple, avec leurs dialogues pleins d’humours dans les scènes d’action.

Réfléchissez à l’utilisation de la magie

Si vous écrivez de la Fantasy, certains alliés utiliseront peut-être leur magie pour se battre. Mais si vous voulez que la magie leur permette de s’en sortir, mieux vaut créer des règles qui nous permettent de comprendre comment le pouvoir fonctionne et ce qu’il est possible de faire avec.

Dans le cas contraire, ce pouvoir sortira un peu de nulle part pour sauver la mise.

Pour aller plus loin sur ce sujet, n’hésitez pas à vous intéresser aux lois de Sanderson.

Le protagoniste peut se sentir perdu, pas les lecteurs

Comme je vous le disais au début de cet article, les scènes de combat et d’action font partie des plus difficiles à écrire. Elles peuvent vite devenir chaotiques et impossibles à visualiser.

Dans les ateliers, lorsque je dis qu’un passage m’a perdue, on me répond parfois, « c’est parce que mon personnage se sent perdu ». Et bien sûr, le personnage peut se sentir perdu et désorienté. Mais le lecteur doit pouvoir suivre ce qu’il se passe.

Pour savoir si votre scène est trop confuse, n’hésitez pas à faire lire votre texte à d’autres personnes et particulièrement à d’autres écrivains qui auront un avis plus technique. Je recommande toujours de partager ses textes à un groupe de critique et/ou à des bêta-lecteurs et c’est d’autant plus le cas pour des scènes aussi complexes.

Vous pouvez facilement vous représenter la scène, parce que vous l’avez imaginée. Votre groupe de critique verra ce que vous avez vraiment écrit dans votre livre. Vous saurez ainsi si vous devez clarifier certains passages et si la lecture n’est pas trop compliquée.

N’hésitez pas à réécrire votre scène de nombreuses fois. Une scène de combat est rarement claire dans le premier jet.

J’espère que cet article vous aidera à améliorer vos scènes de combat. Si vous avez d’autres astuces, n’hésitez pas à les partager dans les commentaires.

Pour aller plus loin, découvrez aussi les ateliers d’écriture créative pour ados et pour adultes. J’adore y aborder cette thématique !